Retour de Laureen

Matthéo venait de quitter Lonely Heart pour donner un coup de main à Lucas qui gérait seul le Dot depuis plusieurs semaines. Le départ de ses enfants avaient beaucoup affecté son frère et il se perdait dans le travail. Mais aujourd'hui il avait un impératif et devait quitter le navire quelques heures. Heureusement pour Matt qui avait un peu perdu la main en quelques semaines, il n'y avait pas beaucoup de monde cette matinée là. Juste quelques ados un peu bruyants un punk et un couple de retraités. La population du Dot était toujours éclectique mais chaleureuse. Il ramassait des assiettes quand deux furies hautes comme trois pommes foncèrent vers lui en hurlant : "Ooooooooooooooooooooooncle Maaaaaaaaaaaaatt". Il était grillé. Matthéo avança avec difficulté jusqu'au bar avec ses dix assiettes sales dans les mains et une fois la vaiselle mise à l'abri des "terreurs" il put parler.

- Quelle tornade ! Salut les filles.

Matthéo souleva l'une des petites d'un bras avant de chatouiller la seconder puis finalement il couvrit les deux crapaux de baisers sonores et mouillés qui les firent hurler. Il arrêta et les regarda prendre quartier dans l'aire de jeux spécialement réservé aux enfants dans un coin du Dot. Il se tourna vers Laureen qu'il enlaça.

- Laureen ça fait plaisir de te revoir. Comment est ce que tu vas ?

[Désolée pour le retard j’espère que tu m’en veux pas Smile

]

Il fallait qu’elle le voit. Elle avait besoin de lui. Il avait toujours su quoi dire pour la rassurer, quoi faire pour la consoler. Il était l’un des piliers de sa vie et elle savait que jamais il ne la laisserait tomber. Il était comme ça. C’était son beau-frère et il le resterait jusqu’à la mort, même si Lucas et elle devaient se séparer. Rien que d’y penser Laureen sentit les larmes monter. Elle les essuya d’un revers de la main lorsque Linor posa sa petite main sur la joue de sa maman pour y enlever une larme. La jeune femme sourit tendrement à ses deux princesses et se décida enfin à sortir de sa voiture. Elle leur ouvrit la porte et les fit entrer dans un restaurant qu’elles connaissaient par cœur, leur père étant le propriétaire des lieux. En parlant de Lucas, Laureen s’était assurée avant de retrouver Matthéo au Dot que son mari n’était pas dans les parages. Elle ne se sentait pas du tout prête à le voir. Il y avait encore trop de non dits entre eux, et elle savait à l’avance que les retrouvailles seraient tout sauf chaleureuses. Elle envisageait donc de le revoir dans un endroit où ils pourraient discuter seuls, et sans couteau ou huile bouillante à porter de main. La jeune femme sourit en trouvant du regard la personne qu’elle cherchait. Ce qui était plutôt facile, car le Dot semblait plutôt calme aujourd’hui. Elle lâcha la main de ses petits démons lorsque les deux fillettes se mirent à hurler le nom de leur oncle et les laissa courir vers lui. Elle savait que Matthéo leur avait manqué et réalisa à ce moment précis à quel point il lui avait manqué à elle aussi. Mais ce qui la troubla le plus était de revoir ce visage, semblable en tout point à celui de l’être aimé. Normal pour des jumeaux de se ressembler me direz-vous, mais la ressemblance était d’autant plus frappante après une si longue absence. La jeune femme secoua légèrement la tête et se rapprocha de son beau-frère une fois que ses filles le lâchèrent pour courir vers l’air de jeux. Elle lui fit son plus beau sourire et se laissa enlacer en soupirant de bien-être. Oui, il lui avait terriblement manqué.

- Tu m’as tellement manqué… Je suis heureuse de te revoir. T’as l’air en forme. Moi ça va, y a des jours avec et des jours sans, mais bon, je dois rester forte. Pour eux. Mais pour elles surtout les deux autres sont grands ils ont plus réellement besoin de moi.

Le sourire de la jeune femme diminua légèrement mais elle se força à se ressaisir. Mais Matthéo la connaissait presque aussi bien que Lucas alors elle ne se faisait pas d’illusion et savait que son petit manège ne marcherait pas longtemps.

>Hj : Je t'en veux pas ^^.

Matthéo fit resservir des rafraichissements aux jumelles, de la grenadine dans des biberons avec des anses à tête de zèbre achetés par Lucas. Son frère aimait tellement ses enfants qu'il avait eu le coeur brisé par leur départ pour la France. C'était Matthéo qui l'avait convaincu de ne pas faire un procès pour empêcher leur départ dans la ville des lumières. Lucas avait pris l'avion pour aller les voir mais été à chaque fois revenu plus accablé qu'à l'aller. Matthéo ne pouvait pas s'empêcher d'être heureux d'entendre que Laureen ne prenait pas les choses aussi bien qu'il y paraissait. Oui ça lui faisait plaisir d'entendre que même si elle avait commencé à refait sa vie, elle souffrait encore un peu.

- C'est fini, ça y est ? Lucas et toi vous allez divorcer ?

Matthéo lui fit de place sur le bar pour qu'elle puisse s'installer afin de lui laisser la possibilité de voir ses deux petites, s'amuser. Il déposa son tablier sur le côté et s'empara de deux verres pour préparer des milshakes pour la table numéro 8, là où deux gothiques échangeaient leurs salives depuis deux heures. Il revint ensuite vers Laureen pas pressé d'entendre sa réponse. Il aimait son frère et il savait que la fin de son mariage le ferait souffrir malgré la présence d'Adriana à ses côtés.

- Tu veux manger quelque chose ? On fait des doubles hamburgers maintenant en fait on se contente d'en empiler un sur un autre et ensuite on retire une tranche de pain et on rajoute par contre du fromage.

Laureen regarda son beau frère s’occuper si bien de ses petites filles. Matthéo était un amour avec elle et ses enfants et elle savait que si elle devait se séparer de Lucas elle n’arriverait jamais à se séparer de son meilleur ami, en quelque sorte. Elle laissa Ana lui faire un gros bisou sur la joue suivi de Linor avant que les petites repartent jouer. Ses enfants étaient tout pour elle et c’était eux qui lui donnaient la force de se lever chaque matin pour affronter le monde cruel qui les entourait. En entendant Matthéo prononcer le mot divorcer juste après le prénom de Lucas et le sien, Laureen eut la sensation qu’on lui enfonçait un couteau en plein cœur. Elle manqua une nouvelle fois de s’évanouir et se rattrapa de justesse au bar. Quelques larmes s’échappèrent malgré elle de ses yeux et elle laissa Matt la réconforter. Elle savait qu’elle pouvait tout dire et faire devant lui, il ne la jugerait jamais. Elle réussit tant bien que mal à se reprendre et parla d’une voix tremblante.

- Matt… J’ai pas envie de divorcer. J’aime ton frère et ce plus que je ne l’aurais cru possible. Mais il m’a dit de vivre ma vie, et c’est ce que j’ai fait. Pas pour moi, mais pour les enfants. Et je me suis rendue compte à Paris que Lucas ne pourra jamais nous accepter tous, comme on est. Il aime les filles, mais Erwan a été délaissé pendant tellement d’années par son père… Je pense qu’il est temps que je me concentre sur leur bonheur en priorité et si cela doit passer par notre divorce et par une nouvelle relation avec quelqu’un qui cette fois accepte pleinement mes enfants… Alors oui on va devoir divorcer.

Elle l’avait dit. Elle avait prononcé le mot fatal. Elle sentait qu’un poids s’était installé en travers de sa gorge et déglutit doucement plusieurs fois pour le faire partir. Elle jeta de nombreux regards à ses princesses qui ne semblaient pas si accablées que ça par la séparation de leurs parents. Elles étaient sans doute trop petites pour comprendre. Elle accepta le siège que lui offrait Matt et le regarda tendrement lorsqu’il parti servir des clients un peu bizarres. Elle lui sourit quand il se rapprocha de nouveau d’elle et lui caressa tendrement la joue d’un geste fraternel avant d’éclater doucement de rire lorsqu’il lui parla des hamburgers. Il avait toujours su comment lui remonter le moral.

- C’est super ça ! Pourquoi pas ça fait longtemps que je n’ai pas goûté la nourriture du Dot. Au fait… Et toi alors ? Avec Paige comment ça se passe ?

Matthéo posa sa main sur l'épaule de sa belle-soeur en voyant les larmes rouler sur ses joues. Il était heureux d'entendre que quand même le divorce n'était pas une partie de plaisir pour elle. Lorsqu'elle était partie à Paris il avait cru qu'elle tournait la page sur une histoire d'amour longue de dix-huit ans. Il tentait de la réconforter en rajoutant en dessinant un visage sur les frites qu'il venait de lui servir.

- Laureen écoute, tu sais mieux que moi pourquoi Lucas a toujours eu du mal avec Erwan. Pourtant souviens toi quand Rain lui a offert une chance de connaître la vérité, il l'a refusé. Ca prouve bien qu'il est capable de faire des efforts. Donc maintenant ça sera comme ça ? Toi avec Andreas, lui avec Adriana et vous vous partagerez les enfants une semaine sur deux ?

Pauvres gosses. Matt savait ce que ça faisait d'être trimballé de familles en familles. Il avait heureusement eu un frère et des amis sympas qu'il l'avait aidé à supporter cette vie de nomade. Puis quand c'était trop dur il suivait les exemples désastreux de ses proches et s'enivrait pour tout oublier. Il pensait à son neveu et ses nièces, qui seraient maintenant écartelés dans deux foyers et forcés de cohabiter avec des étrangers. Les jumelles n'auraient sûrement aucun souvenir de leurs deux parents ensembles. Lucas et Laureen n'avaient pas l'air de saisir la portée du drame qui se jouait actuellement. Ils restaient là chacun dans son coin à se morfondre au lieu de mettre les choses sur le tapis. Matt trouvait que son frère était un véritable idiot d'avoir agit de la sorte en autorisant Laureen à vivre sa vie loin de lui et elle d'accepter. Ils auraient voulu que chacun se battent un peu plus pour préserver leur couple et leur famille. Ils avaient la chance de s'aimer. Pas comme lui et Paige.

- Je sais pas. On est mariés et je crois que tout se passe bien. On est de bons amis ça c'est sûr. Mais pour le reste... Par exemple, ça fait quatre mois qu'on a pas fait l'amour. confia Matt à voix basse.

Essuyant ses larmes d’un geste rapide pour empêcher que ses filles ne la voient ainsi, Laureen jeta un coup d’œil par-dessus l’épaule de Matt au moment où celui-ci posa sa main sur son épaule à elle. Elle sourit maladroitement à ses princesses qui se rapprochaient et leur donna un peu d’eau et une compote qu’elle leur avait rapportée. Elle les laissa terminer de manger avant de les regarder se diriger de nouveau vers l’air de jeux et de se tourner vers Matt à qui elle n’avait pu répondre devant ses filles. Une fois assurée qu’elles étaient parties, elle pu laisser libre court à ses émotions.

- Mais moi-même je ne la connais pas cette fameuse vérité ! Erwan est et restera le fils de Lucas, peu importe tous les tests du monde ! J’ai envie de retenter une nouvelle fois, pour sauver notre mariage, mais ton frère me repousse sans cesse qu’est-ce que tu veux que j’y fasse moi ! A force de vouloir sauver mon mariage, j’ai négligé tellement mes enfants que mon fils a faillit réussir sa tentative de suicide. Si ton frère ne veut plus de moi alors je dois m’incliner et le laisser tranquille une fois pour toute.

Laureen était encore secouée par les subites révélations qui venaient d’éclater dans son esprit. Lucas avait déjà retrouvé quelqu’un et connaissant Lucas, il voulait certainement s’investir avec cette personne. En effet son mari était un véritable romantique et il n’envisageait pas coucher pour coucher. Il lui fallait un minimum de sentiments. A cette pensée le cœur de la jeune femme se serra avant de se rappeler qu’elle aussi s’était investie dans une relation qui avait fait naître des sentiments nouveaux pour une personne autre que son mari. Ils étaient d’un compliqué tous les deux… Matt avait raison. Pourquoi continuaient-ils à se bouffer la gueule comme ça alors qu’ils étaient fous l’un de l’autre ? Même Laureen n’avait pas la réponse à cette question. Elle se concentra sur ce que son beau frère lui confia et ouvrit la bouche légèrement choquée avant de reprendre contenance. Matt avait besoin de soutien, et pas de pitié. Elle posa sa main sur celle de Matthéo avant de lui sourire d’un air tendre.

- Je suis désolée Matt je savais pas… Mais est-ce que tu sais… pourquoi ça ne se passe pas bien entre vous ? Enfin je veux dire sexuellement et amoureusement parlant ?

Laureen n'avait pas l'air de comprendre que pour Lucas, accepté Erwan comme son fils ne serait jamais possible. C'était comme faire aimer un chat à quelqu'un qui ne les appréciait pas. La comparaison était mal trouvé mais il avait passer plusieurs jours et plusieurs heures à acceuillir les confidences de son jumeau et maintenant qu'il s'était mis qu'Erwan était le fils de Gabriel en tête, il ne pouvait plus s'impliquer davantage dans la vie de ce fils qui l'effrayait. Matt nota quelque chose dans les mots de Laureen qui le fit réagir. Il se dressa et lui demanda :

- Tu veux encore sauver ton mariage, alors que tu es avec Andreas ?

Il regarda la main que Laureen avait gentiment posé la sienne pour tenter de le consoler. Sauf qu'il n'était même pas triste, juste amoureux d'Arno et il se sentait coupable d'éprouver de tels sentiments. Il aurait au moins voulu que Paige soit là, pour qu'il puisse avoir la sensation d'être retenu. Mais sa femme était bien trop occupée à gérer ses sentiments pour une gamine, pour s'occuper des siens. Il se demandait si au fond ils ne s'étaient pas mariés pour se cacher des choses à eux-même. Si leur mariage n'était pas rien d'autre qu'une tenture pour cacher leur bisexualité à tous les deux.

- Parce que.. Parce que j'ai des vues sur quelqu'un d'autre. Sur un garçon et je crois que Paige est attirée par une adolescente. La fille de cet homme qui me plaît. Bizarre, pas vrai ?

La jeune femme secoua la tête. Matt ne comprenait pas. Il ne comprendrait jamais. Comme personne d’ailleurs. C’est vrai que de loin la situation pouvait paraitre idiote et totalement illogique, mais quand on y regardait de plus près, on comprenait facilement pourquoi la jeune femme avait fuit à Paris, emmenant enfants et amant. Cependant Laureen savait aussi que le point de vue de Matt avait du mal à rester objectif, car ils parlaient tout de même de son frère, avec qui il avait toujours tout partagé. La jeune femme soupira légèrement et repoussa l’assiette, qui finalement ne lui disait plus rien, surtout avec la bile qui lui remontait le long de la trachée. Depuis qu’elle avait reposé le pied à Degrassi, c’était tous les jours pareil. Elle savait qu’elle n’aurait pas dû revenir.

- Et ton frère est bien avec Adriana alors… Matt tu comprends pas, j’aime Lucas et notre mariage est la plus belle des choses pour moi, mais je dois penser aux enfants, et vivre avec ton frère… Avec la tension qu’il y a entre lui et Erwan, c’est plus possible. Andreas est quelqu’un d’intègre et de gentil, qui est là pour nous 5 et pas juste pour les filles et moi.

Laureen était d’une sincérité déconcertante. Elle n’avait pas envie de se cacher, pas devant Matthéo alors qu’il s’était toujours confié à elle, sans retenu. Il était ce frère qu’elle n’avait jamais eu le temps de voir grandir et elle savait qu’ils avaient plus que jamais besoin l’un de l’autre. Elle serra sa main en s’accrochant à elle comme une bouée de sauvetage et imagina pendant un bref instant qu’à travers ce contact, Matthéo et elle transmettaient tout leur courage à l’autre pour affronter les épreuves à venir. Elle le regarda un instant et souhaita de tout son cœur réussir à enlever cet air triste qui trônait sur le visage de son ami.

- Ce qui est bizarre, c’est que vous n’en parliez pas entre vous. Cette situation te fait souffrir Matt et ce n’est pas bien. Et je suis sûre que Paige doit en souffrir tout autant. Il faut que vous mettiez les choses au clair une fois pour toute, sinon cette situation va finir par vous tuer.

En prononçant ces mots, Laureen ne savait pas encore qu’elle était proche de la vérité et ne s’attendait pas non plus à vivre un moment mémorable dans la cafétéria de leur ancien lycée remis entièrement à neuf.

Matt se doutait qu'à cet instant là, Laureen devait regretter son retour à Degrassi. Elle était de nouveaux plongés dans les mêmes tourments qu'elle avait quitté six mois plus tôt. Son histoire avec Lucas n'était toujours pas réglé et il pensait que ça serait le cas avant encore de longs moins. En tout cas tant que leur divorce ne serait pas prononcé ou bien leur réconciliation. Il n'y avait que deux solutions à leur problème et la séparation semblait être la plus appropriée même pour lui, le grand sentimentaliste qui croyait toujours qu'il y avait un espoir. Enfin non il n'était pas du tout optimiste, il ne croyait plus en l'amour depuis des années en fait depuis Colleen était morte. Il était un dépressif qui cachait aux autres son mal-être. Il débarrassa l'assiette de Laureen avant d'encaisser le couple de gothiques qui ensuite quitta les lieux.

- Tu pourrais peut-être te séparer d'Erwan...

Matthéo avait dû mal à poursuivre sa phrase. Il était en train de suggérer à Laureen de se débarasser de son fils pour sauver son propre mariage. Il avait honte de le dire mais pourtant plus il y pensait, plus ça lui semblait être le plus intelligent à faire pour donner une nouvelle chance à leur couple. Il ne parlait pas d'un chien qu'on abandonnait sur une aire d'autoroute, mais d'un enfant. Son neveu.

- Je suis très pris avec le Dot et depuis que Lucas et Adi sont fiancés, j'ai un peu plus de boulot donc le moins de temps de parler avec ma femme. Paige est elle-même très occupée avec son bar et ses autres entreprises.

Était-il entrain de perdre la tête ? Laureen se posa la question dès le moment où le jeune homme acheva sa phrase. Se séparer d’Erwan… Autant demander à la jeune femme de se couper un bras ou une jambe. N’importe quoi. Erwan était son sang, son cœur, et personne ne pourrait le lui enlever, tout comme Autumn, Linor et Ana. Ils étaient les enfants de Laureen et elle était prête à tout pour les protéger, quitte à les éloigner le plus possible d’un oncle et d’un père visiblement complètement frappés. Elle surveilla une fois de plus ses deux princesses quand Matthéo se leva pour encaisser les clients avant de le regarder d’un air coléreux quand il revint s’asseoir face à elle.

- T’as d’autres idées brillantes de ce genre à me suggérer ?

Laureen secoua la tête pour se reprendre. Ça ne servait à rien de s’énerver contre Matt, il n’avait pas pensé à mal en disant ça, il pensait avant tout au bonheur de son frère et de sa belle sœur… du moins c’est ce que Laureen espérait. Même si elle se doutait bien que Lucas ait pu être assez fourbe pour fourrer dans le crâne à Matthéo l’idée qu’Erwan était un être malfaisant, qui était seul responsable de la situation dans laquelle la famille Johanson se trouvait actuellement. Ouais il en était capable. Mais elle décida de faire amende honorable et laissa à Matt le bénéfice du doute.

- Désolée de m’être emportée ainsi Matt mais… ce que tu me suggère là est complètement absurde. Demander à une mère de se séparer de son enfant sous prétexte d’espérer sauver son mariage… Aucune mère censée ne pourrait choisir son mari.

C’était un fait vérifié et véridique. Toute mère qui se respecte ne pourrait tolérer de laisser partir la chair de sa chair tout ça pour garder ou récupérer un homme. Un enfant, c’est la chose la plus sacrée au monde – du moins pour Laureen – et jamais au grand jamais elle ne pourrait choisir d’exiler Erwan juste pour récupérer son époux, qui visiblement semblait avoir bien tourné la page, puisque Matthéo venait de lui balancer comme si de rien n’était que Lucas était fiancé avec Adriana. Quelle merveilleuse nouvelle ! Ils n’étaient même pas encore divorcés que Lucas envisageait déjà de se remarier avec une autre. Laureen était entrain de se demander si le soi-disant break que Lucas lui avait demandé de faire pour permettre à la jeune femme de se retrouver n’était pas en fait une simple mascarade pour faire éclater au grand jour une aventure extra-conjugale que son mari entretenait depuis un moment avec cette autre femme. Venant de Lucas, cela ne serait guère étonnant. Le visage de Laureen ne laissa rien paraitre sur le conflit intérieur qui s’était engagé en elle, et c’est d’une voix calme et posée qu’elle reprit la parole.

- Ce n’est pas une raison Matthéo. Là tu es entrain de chercher des excuses. Il faut que tu trouves le moyen de parler à Paige. Et ce le plus vite possible. Il faut absolument que vous sachiez où vous en êtes. Et il vous faut trouver une solution sur le long terme, quitte à divorcer si c’est la seule issue possible.

Matthéo n'avait pas d'enfant et par conséquent il ne savait pas ce que pouvait ressentir une mère en entendant les mots qu'il avait prononcé. C'était une idée loufoque voir déplacé de proposer à Laureen d'abandonner son fils pour le bien-être de Lucas. Il avait honte maintenant qu'il y réfléchissait. Par chance Laureen, fut assez sympa pour lui pardonner son écart de langage, elle devait savoir qu'il ne pensait pas à mal. Contrairement à son frère, lui ne faisait aucune différence entre les quatre enfants et les adorait autant l'un que l'autre. Même si Erwann avait quelques difficultés mentales indégnables. Elle revint sur Paige et lui, lui préféra ne pas revenir sur Erwann et Lucas le sujet était bien trop sensible et puis lui n'y connaissait rien en couple, le sien était en crise. Il salua l'une des serveuses qui faisait office d'associé et de gérante lorsque Lucas ou lui n'était pas là. Il n'avait pas pris de pause depuis ce matin, c'était peut-être le moment de quitter le Dot, pendant qu'il n'y avait trop de clients et de future catastrophe à l'horizon.

- Tu as peut-être raison. Mais j'ai tellement peur d'être seul. Bien sûr j'ai des amis et je t'ai toi et les enfants mais, ça risque d'être difficile sans personne qui m'accueille quand je rentre à la maison. Bon, laissons un peu tomber nos problèmes conjugaux, tu veux bien ? Que dirais-tu de faire un petit tour au zoo avec les filles ? Ok c'est super glamour mais je te rappele quand est à Degrassi ici et pas à Paris. taquina gentillement Matthéo en déposant son tablier sur le bar.

Le plat apporté par Matthéo pour la jeune femme avait commencé à refroidir depuis un moment. Laureen n’arrivait pas à toucher à cette nourriture qui lui rappelait les fois où elle et Lucas s’étaient retrouvés seuls ici, après la fermeture du Dot, à manger des frites grasses et des hamburgers devant la télé du bureau du jeune homme tout en s’embrassant de temps en temps, si ce n’était tout le temps. Cette époque lui semblait tellement lointaine à présent… Laureen tenta de se focaliser une fois de plus sur ce que disait Matt plutôt que sur ses souvenirs, ce qu’elle fit sans peine, au vue de la tristesse qui semblait se tapir au fond de ses beaux yeux bruns. La jeune femme le regarda poser son tablier et se leva pour se mettre à sa hauteur avant de le serrer dans ses bras.

- Matt… Saches que tu ne seras jamais seul. Peu importe ce qui se passe entre ton frère et moi, je t’aime et ça personne ne pourra le changer. Tu fais partie de ma famille et jamais je ne te laisserais tomber crois moi.

Elle espérait que Matthéo la croirait, car elle était tout ce qu’il y a de plus sincère. Laureen l’adorait, il était le frère qu’elle n’avait jamais pu avoir, et rien ni personne ne pourrait l’empêcher de continuer à voir Matt, même lorsque Lucas et elle serait divorcer. Elle prit un air faussement boudeur quand il lui parla du glamour de Paris comparé à celui de Degrassi avant d’éclater de rire. Elle avait oublié à quel point Matthéo était doué pour changer de sujet et rendre un moment désagréable beaucoup plus cool, juste avec quelques paroles et un doux sourire.

- J’accepte volontiers. Et je pense que les filles seront ravies d’aller voir les animaux avec leur oncle favori.

Facile en même temps, elles n’en avaient qu’un seul. Mais bon tout ça ce n’était que des détails, et Laureen et Matthéo passaient outre à chaque fois. Laureen rassembla ses affaires ainsi que celles de ses filles et se tourna vers l’aire de jeux. La jeune maman appela ses deux trésors qui comme d’habitude déboulèrent comme deux tornades brunes. Laureen se baissa et embrassa chacune de ses petites princesses sur la joue avant de les regarder toutes les deux et de leur parler doucement, une petite lueur malicieuse dans les yeux.

- Ana, Linor, on va voir les animaux avec oncle Matt ça vous dit ? Les petites filles poussèrent des petits cris de joie, montrant bien qu’elles étaient heureuses d’aller au zoo. Pourquoi ça ne m’étonne pas… Laureen se tourna vers Matt en lui faisant un beau sourire. Nous sommes prêtes. On y va ?

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