Tu avais raison depuis le début ... (Lux)

" Je suis au dispensaire. Ils veulent pas me laisser repartir seul. Tu peux venir stp ? A. "

Arthur avait du appeler Lux à l'aide. Il s'en voulait de faire appel ainsi à elle alors qu'elle avait bien d'autres soucis en tête. Mais il ne pouvait faire appel à personne d'autre. Lily Rose n'était pas la personne qu'il souhaitait voir dans un moment pareil, et Chloé et Gaby étaient toutes les deux occupées. Lux l'avait eu au téléphone, quelques minutes à peine avant qu'il atterrisse ici et il savait qu'elle n'avait rien de particulier de prévu pour cette fin d'après-midi. Il aurait du, à ce moment là, tout lui dire ... Il aurait du lui raconter ce qu'il venait de se passer entre lui et Charlie, mais il ne s'en sentit par le courage. Il avait préféré continuer à marcher sans but précis. Et c'est sans faire attention à ce qu'il se passait autour de lui qu'il avait traversé la grande avenue, tête baissée, et que la voiture l'avait percuté.
L'impact avait été assez violent, le faisant rouler sur quelques mètres au sol. Il n'avait pas crié, mais pourtant la douleur était là. Mais la douleur l'apaisait. Elle apaisait sa souffrance psychique depuis qu'il avait quitté la chambre de Charlie.
Les pompiers étaient arrivés rapidement, le conducteur de la voiture les ayant appelé immédiatement, complètement paniqué. Arthur leur avait dit que tout allait bien. Il avait passé des radios, les contusions étaient nombreuses. Il avait aussi une brûlure à la cuisse et son jean était bon à jeter. Les infirmières lui avaient administré les premiers soins, et il avait demandé à partir. Le médecin lui avait demandé que quelqu'un vienne le chercher et c'est comme ça qu'il avait fini par envoyer ce message à Lux.
Quand elle arriva, Arthur était encore allongé sur le lit, dans un box à moitié ouvert. Il lui sourit mais son sourire se transforma en grimace, tant il avait mal et ce malgré les anti-inflammatoires. Il l’accueilli par un "Hey" puis il lui dit :

- Tu avais raison pour Charlie.

Lux était entrain de faire son sport hebdomadaire sur son tapis de course lorsqu'elle avait reçu le fameux texto qui la fit tomber du tapis tant sa surprise était grande. Elle avait dû s'y reprendre plusieurs fois afin d'être sûre de ne pas avoir mal compris. Arthur... Son Arthur était à l'hôpital. Mais que lui était-il donc arrivé ? Sans prendre le temps de se changer, Lux se rendit dans son garage où elle sauta dans sa voiture. Elle grilla plusieurs feux rouges, manqua de faire un accident, mais elle s'en fichait. L'important, c'était Arthur. Il fallait absolument qu'elle sache ce qu'il s'était passé. Elle arriva à l'accueil de l'hôpital où une bonne femme un peu incompétente mit un temps fou à lui dire ce qui s'était passé avec Arthur et surtout où il était. Ce dispensaire était différent de l'hôpital où elle avait l'habitude d'aller, songea la jeune femme en se dirigeant vers le box où son ami était. Mais malgré tout, l'odeur y était tout comme la maladie et le sentiment d'oppression qui y régnait. Lux chassa ses sombres pensées en découvrant l'état d'Arthur. Il était moins endommagé qu'elle l'avait pensé. Bien. Elle pourrait le frapper et lui faire regretter ce qu'il lui avait fait subir. Elle tiqua en entendant sa première phrase. Non, il n'allait pas lui faire ça.

- Et c'est une raison pour aller se jeter sous une voiture ? Tu n'as pas le droit de partir avant moi c'est bien compris ?!?

La voix anormalement tremblante et légèrement fâchée de Lux montrait à quel point elle avait eu peur pour son ami. Elle était en colère contre lui, fait étonnant quand on savait qu'elle ne se mettait jamais en colère. Mais c'était une colère qui masquait la terreur qu'elle avait pu ressentir en le sachant à l'hôpital. Et savoir que Charlie était en partie la raison de cet accident... Lux sentait que si elle avait la jeune Thomas en face d'elle, celle ci allait regretter d'avoir croisé sa route.

La présence de Lux l'avait immédiatement soulagé. Voir un visage connu et bienveillant à ses côtés le rassurait. Arthur savait qu'il n'avait que ses amis sur qui il pouvait compter, ayant tiré un trait sur sa famille depuis un moment déjà, se marginalisant davantage à cette époque. Si Lux n'avait pas répondu à son SOS, il serait sûrement en train de dépérir au fond de ce lit miteux. Et quand il l'entendit lui répondre, il comprit. Il comprit plusieurs choses, mais notamment la force de leur amitié. Parce que derrière les mots, derrière la voix tremblante et la colère, se cachait de la peur et surtout de l'affection. Quand on a peur de perdre quelqu'un, c'est parce que cette personne est devenue indispensable à notre vie, ou notre survie, dans le cas de Lux. Il comprit qu'il avait été con de faire ce qu'il avait fait, même si c'était inconscient, qu'il ne l'avait pas fait volontairement ... en temps normal, il ne se sera jamais avancé sur une avenue dangereuse sans vérifier à 3 reprises que les voitures le laisseraient passer. Il comprit qu'il avait perdu pied à cause d'une fille. Il comprit qu'il devait se reprendre, car ce n'était pas dans sa nature de se laisser aller comme ça. Il avait été déjà si malheureux avec Lily Rose, qu'il continuait à aimer secrètement, car on n'oublie jamais comme ça son premier amour.
Alors, histoire de dédramatiser la situation et de rassurer son amie, il s'excusa à sa manière pour la peur qu'il lui avait causé.

- J'ai été con, mais ça n'arrivera plus. Et t'inquiète pas, je compte bien continuer à t'embêter jusqu'au bout.

Cette pensée lui provoqua une grosse boule dans la gorge. C'était si glauque de parler comme ça de sa future mort, surtout dans un endroit pareil. Il en avait la chair de poule. Il fallait qu'ils partent d'ici au plus vite.

- Tu veux bien me sortir d'ici au plus vite ? Cet endroit est juste sinistre !

Les réponses d'Arthur la rassurèrent au moins sur deux points : il n'était pas mourant, et il avait compris qu'il avait été un imbécile fini en lui faisant avoir la peur de sa vie. Pourtant le soulagement ressenti par Lux n'arrivait pas à effacer l'angoisse qu'elle continuait de ressentir. C'était presque malgré elle. Elle connaissait son échéance et avait fini par l'accepter. Mais elle n'était pas prête à se dire que l'un de ses proches pouvait partir avant elle. Elle n'était pas prête à accepter de ressentir la douleur qu'ils allaient forcément ressentir lors de sa disparition prochaine. Lux savait que c'était purement égoïste, mais ces derniers temps, elle n'en avait que faire de paraitre comme cela aux yeux des autres. Ses proches ne devaient pas partir avant elle, un point c'est tout. Elle avait envie d'hurler sur Arthur, de le frapper juste là où il avait mal, mais les mots restèrent coincés dans sa gorge. Elle était là, figée, ayant encore du mal à réaliser ce qui venait de se produire, et surtout que son ami allait bien. Aussi se contenta t-elle simplement d'un hochement de tête, avant de se décaler pour laisser passer le médecin qui venait pour examiner une dernière fois le jeune Flakes. Puis ils les laissa tous les deux, le temps d'appeler une infirmière qui devait donner à Arthur les médicaments qu'il lui avait prescrit. Lux resta silencieuse après le départ du médecin n'osant pas s'approcher, et ne sachant que dire. Arthur avait raison, il fallait qu'ils sortent de là. Peut être alors que la peur qu'elle ressentait disparaitrait. Et peut être alors qu'elle pourrait redevenir la Lux qu'elle était et qu'elle pourrait enfin lui dire sa façon de penser.

Arthur se laissa examiner une dernière fois. Il attrapa les ordonnances et pencha la tête en guise de réponse aux différents conseils prodigués par l’infirmière. Il n’avait qu’une hâte : partir d’ici et oublier que celle qui était la cause de cette situation venait de le plaquer comme une vulgaire merde. Il voulait noyer son chagrin dans l’alcool, dans quelque chose de fort, qui apaiserait en plus son mal physique. La voiture avait eu beau freiner comme elle avait pu, il avait été percuté assez violemment et les hématomes risquaient de lui faire mal encore quelques semaines. Peut-être allait-il demander à Chloé de le fournir en dope un peu plus forte, pour sa conso personnelle, histoire de s’apaiser. Ou peut-être allait-il accepter sa peine et sa souffrance en silence, en serrant les dents, parce qu’il avait été trop con de tomber amoureux de Charlie Thomas.
Une fois dehors, alors qu’il avait entouré Lux par la taille, comme s’ils formaient un vieux couple, Arthur essaya de prendre une profonde respiration afin de respirer l’air frais et presque pur de Toronto. Sauf que la douleur ne lui permit que de faire une grimace qui en disait long sur l’état de ses blessures. Ne voulant pas perdre la face, il s’empressa de relancer la conversation, les deux amis n’ayant pas échangé un seul mot depuis l’entrée de l’infirmière dans le box :

- Tu veux faire quoi maintenant ? Je suis à ton service pour le reste de la journée, pour te remercier d’être venu me libérer. Tes désirs sont des ordres.

Il lui adressa un large sourire, en attendant sa réponse.

Toujours silencieuse, Lux écoutait sans vraiment entendre ce que l'infirmière disait à son ami. Trop de pensées sombres avaient envahi son esprit, et elle sentait qu'elle allait finir par exploser si elle ne changeait pas vite d'air. Fort heureusement, les médecins laissèrent Arthur sortir, et la jeune femme marcha en direction de la sortie. Elle laissa le soleil réchauffer son visage, avant d'être surprise par le geste de son ami, qui la fit sortir de sa torpeur. En entendant ses paroles, elle se dégagea de son étreinte, incapable de se contenir et de faire comme si de rien n'était. La jolie métisse se tourna alors vers lui et lui asséna une gifle suffisamment forte pour surprendre autant Arthur qu'elle.

- Tu n'as plus jamais intérêt à me faire une telle peur c'est bien compris ? Tu n'as pas le droit de partir avant moi, personne n'a le droit, vous ne devez pas m'abandonner ! Je... je...

Pendant son petit discours, Lux n'avait pas arrêté de trembler. Elle n'arrivait pas à finir sa phrase, tant la peur que lui avait fait Arthur avait fait remonter des tas de choses. Elle s'était toujours cru à l'abri de tout sentiment, et s'était toujours sentie quelque part puissante. Puissante de savoir qu'elle n'aurait jamais à souffrir de la perte d'un être cher, car elle partirait forcément avant eux. Et là, en l'espace d'un instant, elle venait de comprendre et de réaliser que ses proches n'étaient pas des êtres immortels, et qu'il n'y avait pas qu'une maladie incurable qui pouvait tuer quelqu'un. Toujours tremblante, elle commença à frapper Arthur de toutes ses frêles forces, sur le torse. Et quelque chose d'inattendu de sa part se produit. Elle laissa échapper quelques larmes. Larmes trop longtemps refoulés. Pour ses parents, pour ses amis, pour Piotr, pour tous ceux qu'elle aimait et qu'elle allait laisser. Et plus elle tentait de les retenir, plus les vannes semblaient intarissables. Les coups qu'elle portait à Arthur ne devaient sans doute pas lui faire plus mal que ses blessures, mais Lux avait l'impression que si elle ne continuait pas, elle allait s'effondrer.

» Esther. La raison du coeur dépasse celle de la pensée.
» T'avais-je emmené dîner ici lorsque tu étais ma maîtresse ? [REBECCA]

Tu avais raison depuis le début ... (Lux)

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