Conseils d'un... père (?!?) à sa fille [PV Beth]

Conseils d'un... père (?!?) à sa fille [PV Beth] E11

Watching me, wanting me
I can feel you pull me down
Fearing you, loving you
I let you pull me down

- Laissez la moi je vous dis. Empotée !!!

Bien que maîtrisant peu l'anglais, la bonne autrichienne fondit aussitôt en larmes une fois l'insulte prononcée. Cruz leva les yeux au ciel en songeant qu'une centaine de mots bien plus blessant lui était venu en tête à la place "d'empotée" et qu'il s'était abstenu de les utiliser pour ne blesser l'ego de cette obèse au quadruple menton engagée par sa mère. Bébé Prudence dans les bras esquissa le sourire le plus adorable de la terre comme si elle se moquait des larmes de l'employée de maison et cette dernière se mit à gémir comme si elle apprenait qu'il ne restait plus de cet affreux saucisson odorant dont elle se gavait secrètement tous les jours. Sa jolie poupée dans les bras, il quitta l'élégante chambre entièrement refaite par les soins du décorateur d'intérieur de renom - bien que largement influencé par le style et les idées précises de Beth qui avait toujours un goût très sûr en matière de décoration. La précieuse princesse bien nichée dans ses bras, Cruz descendit avec précaution les escaliers de la maison dans laquelle il vivait à peine. Depuis le retour de sa mère et de sa... fille - le mot le faisait toujours autant frémir - il couchait à l'hôtel en compagnie de Warhol dont le compte en banque flirtait désormais avec le zéro. Les deux pénis sur pattes qu'ils étaient enchainaient avec un facilité déconcertante plan cul digne des meilleurs films X et drogue de qualité fourni par le dealer des stars. Une existence de rêve qui ne faisait que le détruire à petit feu. Dans les rares moments de lucidité qu'il avait, quand il cherchait à comprendre le pourquoi de cet autodestruction, il prenait rendez vous avec sa psychiatre - qui lui prenait près de 500 dollars pour une demie-heure sur son divan - les mots troubles maniaco-dépressifs suffisaient à lui faire quitter la pièce. Merde. Il n'était pas taré. Non. Pas possible. Il avait une existence exceptionnelle et privilégiée. Une vie idyllique où l'odeur de latex des capotes se mêlait harmonieusement au Chanel n°5 de ses conquêtes. Pourtant ça ne l'empêchait pas de souffrir et de s'amuser à coller un revolver sur sa tempe pour se sentir un peu vivant.
Assis dans le rocking-chair hérité de sa grand-mère maternelle, qui se trouvait dans la salle de jeu, il berçait doucement la jolie Prudence dont les cheveux noirs ébènes lui rappelaient les siens avant qu'il ne s'entiche de son fer à lisser. Quoique maintenant ses cheveux étaient courts et rarement coiffés. Ce laisser-aller avait pourtant - d'après les dires de la blonde qu'il avait sauté dans l'ascenseur de l'hôtel Hilton - multiplié son pouvoir de séduction. Mouais. Et alors ? Les seules filles qui parvenaient à faire battre son coeur de pierre s'attachait de façon malsaine à son frère cadet. Et l'autre amour de sa vie était justement celle qui lui avait donné la vie. Finalement il y avait de quoi s'angoisser durant des heures et noyer son mal-être dans de l'alcool.

- Tu vois petite Prudence tout le monde te dira que la vie c'est l'amour. Ou le contraire. Mais c'est faux. L'amour c'est la mort. La mort c'est l'amour. Ne tombe jamais amoureuse. Jamais. Laisse ça aux imbéciles masochistes.

Beth, depuis la naissance de Prudence, avait peu revu Cruz, qui ne vivait plus dans la demeure des Spencer. Pour être exact, elle avait totalement abandonné son rôle de mère. Elle ne voulait plus avoir cette étiquette. Elle avait également accepté de s'effacer en tant que femme, amante, pour ne pas le brusquer, persuadée qu'il reviendrait de lui-même. C'était un peu adapter la politique de l'autruche, elle en avait conscience, mais aucun rôle ne lui convenait. Elle ne voulait plus être la mère. ELle ne pouvait plus être la maîtresse. Elle voulait être la femme, la mère de sa fille, mais tout ceci lui était interdit. Elle avait donc décidé de faire preuve de patience, et de l'attendre. Quitte à prendre le risque que jamais Cruz ne revienne vers elle.
Mais ils avaient ce lien en plus, désormais. Cette petite fille, fruit de leur amour défendu. Beth n'avait jamais pressé Cruz pour qu'il s'en occupe comme un père. Mais elle espérait secrétement qu'il prenne ses responsabilités.
BEth était dans la salle de bain quand elle entendit une voix familière qui lui fit trembler tous les membres. Il était là. Il n'y avait aucun doute. Et il était avec elle. Leur fille. Leur princesse.
Quittant la salle de bain, à moitié dénudée, Beth se dirigea vers la voix qui la guidait. Elle le reconnaissait bien là, à hurler sur les domestiques, tout en se maîtrisant et en n'employant pas une floppée d'insultes verbales. C'était tout lui. Quand elle l'aperçut, dans l'entrebaillement, les cheveux plus courts qu'à son souvenir, elle sentit son coeur faiblir. C'était comme si elle voyait un fantôme. Le fantôme de l'être aimé et disparu. Il était toujours aussi beau, toujours aussi sauvage.
Et le voir, avec dans ses bras, lovée contre son torse, leur petite fille, la fit totalement sombre. Se faisant discrète, elle les observa un instant. Puis elle entendit la confidence faite entre un père et sa fille, et le sourire de Beth se figea. Il avait trop souffert lui aussi, mais il semblait n'avoir plus aucun espoir, contrairement à elle. Il n'avait même pas 20 ans et n'attendait déjà plus rien de l'amour, de la vie. Cela déchira les trippes de Beth, qui se forca à retenir ses larmes. Puis, avec pudeur, elle s'avanca vers ces deux enfants et toussota.
Elle n'osait même pas ouvrir la bouche, de peur de bafouiller, de peur de pleurer, de peur d'hurler ... Mais la peur de se retrouver face à l'amour de sa vie lui fit au final prendre la parole et elle dit, calmement et d'une voix douce et chaleureuse :

- Tu as pourtant sous tes yeux la plus belle preuve d'amour et de vie qui soit ...

Elle se rapprocha encore de lui, pouvant sentir son odeur et sa chaleur. Alors que l'instinct allait reprendre le dessus, qu'elle allait lui demander s'il se nourrissait bien, s'il dormait bien et travaillait bien en cours, elle se mordit la langue, s'interdisant ce genre de rapport, et ne voulant rien brusquer. Cruz était là, c'était l'essentiel.

Alors que les minuscules paupières de Prudence se refermaient, la voix de Beth se fit entendre réveillant le bébé et ses sentiments qu'il s'efforçait d'ignorer depuis toujours. Ses membres tremblèrent tout comme sa lèvre inférieure qu'il mordit jusqu'au sang pour s'empêcher de... De quoi ? Ressentir ce flot d'amour et de sentiments emmelés qui refaisaient surface dès qu'il repensait à elle et à ce qu'ils avaient fait ? Mon dieu. C'était sa mère. Cette femme si désirable, celle qui était la cause de ses échecs sentimentaux, ridicules placebo pour compenser cet amour insensé qui lui portait, était sa mère. Il ne pouvait pas. Il ne devait pas l'aimer. Pourtant chaque parcelle de lui la désirait. Il la voulait. Et la preuve de cet idylle sans espoir et immoral était là dans ses bras sous la forme la plus magnifique. Prudence. Leur petit bébé d'amour qu'il devait considérer comme sa soeur, qu'il voulait considérer comme sa soeur pour ne pas se hair d'avoir briser la morale. Lui qui s'efforçait de défier chaque jour les lois et les règles de la société, ne parvenait plus à se regarder dans le miroir depuis qu'il avait fait l'amour avec Beth. La culpabilité qu'il ressentait devenait chaque jour de plus en plus pesante. Cet amour trop grand était beaucoup trop démesuré pour l'adolescent qu'il était encore.

- Adrian doit l'adorer... Sa fille... Les mots lui lacèrent la gorge... est aussi belle que sa mère.

Il n'osait même pas poser les yeux sur elle. Il respirait aussi à peine. Juste l'odeur de sa peau le rendait fou de désir et ravivait cette passion qu'il enfouissait à litre d'alcools et surdose de drogues. La petite Prudence sereine malgré la tension qui grandissait entre ses parents, s'endormait. Cruz quitta le rocking-chair et se leva tout en tournant le dos à Beth. Incapable de la regarder sans fondre en larmes devant tant de gâchis. Il la haissait de lui avoir fait reconnaître son amour pour ensuite l'abandonner lâchement.

Adrian. Quand ce prénom résonna aux oreilles de Beth, cette dernière eut envie de crier. Crier sur Cruz, de se taire. Lui hurler qu'elle le détestait. Le haïssait. Qu'elle ne le supportait plus. Qu'elle ne supportait plus tout ça. Toute cette mascarade. Qu'elle n'était même pas sa mère. Combien de fois avait elle espérer découvrir que Cruz avait été échangé à la naissance, et combien de fois cette pensée l'avait fait culpabiliser au point de ne pas dormir pendant des jours entiers. Elle était mauvaise, elle était le diable. Mais lui alors, qui était-il ? Il l'avait aimé, il l'avait adulé, et maintenant, il la réduisait à néant. Elle ne pouvait plus être sa mère, ni sa femme. Et voilà qu'il reniait qu'elle était la mère de son enfant.
Se retenant de se jeter sur lui pour lui faire prendre conscience qu'elle était là, devant lui, et qu'elle l'aimait à en crever, elle se renferma sur elle même, et mit son masque de fer froid, cachant ainsi tous sentiments, et tout en fusillant Cruz qui était de dos, lui dit :

- Prudence n'a pas de père.

Du moins, Adrian ne l'était pas. Et elle préférait que sa fille grandisse sans père, qu'avec un père comme Adrian. Cruz était encore jeune pour assumer une paternité, mais au fond, dans son coeur de mère, elle savait qu'il ferait marche arrière et reviendrait former une famille avec Beth. En attendant, Beth patientait, se consummant peu à peu de l'intérieur.

Secrètement, il savait qu'il l'avait blessé en niant cette paternité. Tout comme il tentait de nier leur amour qui occupait la pièce et se lisait à travers les regards qu'ils ne s'échangeaient pas. Il lui tournait toujours le dos et pourtant il la voyait l'imaginait belle et blessée mais digne. Toujours digne. Maintenant il savait qu'elle s'efforçait d'être froide pour ne pas être touchée et émue par ses paroles blessantes d'adolescent immature. La bonne toujours en larmes mais cette fois-ci silencieuse, s'afficha dans l'encadrement de la porte, tête basse attendant les ordres. Cruz lui fit signe d'approcher, ses yeux se perdirent un instant sur le corps presque nu de sa... Beth. L'air dans ses poumons parut se raréfier et aucun son ne franchit ses lèvres. Prudence quitta ses bras pour trouver ceux potelés de la gouvernante qui quitta la pièce. Les laissant seuls. Cruz s'approcha de quelques pas avant de reculer. Jamais il n'avait été si inconstant, si incapable de se décider entre partir ou rester, l'embrasser ou la gifler. Après quelques secondes de silence et de réflexion, il put enfin parler même si le ton de sa voix était bas et incertain.

- Beth... Pars je t'en pries. Repars avec elle. Tu veux vraiment que ta seule enfant encore mentalement saine devienne folle comme Ugo et moi ? Cette maison...

Il secoua la tête en repensant à tous les souvenirs accumulés et aux années de joie et de bonheur, de malheur et de tristesse qui imprégnaient les murs fraichement repeints. Cette foutue baraque qui avait abrité les soupirs de Beth et Adrian, et plus récemment d'Ugo et Chloé...

- Cette maison est pourrie, maudite. Elle est le symbole de ce qu'on a été, une famille dysfonctionelle et je ne veux pas que Prudence y soit rattachée.

Ils se connaissaient par coeur. En fait, ils auraient pu prévoir à chaque fois la réaction de chacun. Etait-ce ça, des âmes soeurs ? Peut être. En tout cas, Beth reconnaissait bien là Cruz. Mais comment pouvait-il parler de famille, eux qui n'en avaient jamais réellement formé une ? Ou juste une famille théâtralisée, manipulée, mise en scène par Beth elle-même pour parfaire à l'image de famille qu'elle se faisait. En réalité, sa famille se trouvait là, devant elle, en les personne de Cruz et Prudence. Mais un peu à l'image d'un film où tout sépare le héros de l'être aimée, leur famille ne pouvait pas exister sans qu'il y ait autour de la souffrance, des obstacles. Et elle ne pouvait pas lui imposer ceci. Cruz était encore un enfant, et pourtant, il venait de dire la chose la plus sensée qui soit.
Partir. Partir était sûrement la chose à faire. Reconstruire la vie. Offrir un père à Prudence. Un père mature, responsable, et avec aucun lien de sang avec sa mère. Un père normal. Mais Beth ne le voulait pas. Elle était la Pénéloppe des temps modernes, ne pouvant se résoudre à quitter son palais tant que son bien aimé revienne de la bataille. C'était ça, pour le moment, leur famille bataillait pour vivre, ils n'avaient pas encore perdus la guerre et Cruz pouvait revenir à tout moment. Alors, patiemment, elle attendait.
Croisant furtivement le regard de Cruz, ce qui lui fit perdre ses moyens l'espace d'un instant, elle se maîtrisa et lui répondit :

- Nous attendons le retour d'une personne pour pouvoir partir. Ne t'inquiète pas, elle ira bien.

Et c'est à ce moment là que Beth ne put se retenir de faire ce qu'elle se retenait de faire. Elle s'approcha de Cruz, posa délicatement ses doigts fins sur l'épaule de Cruz, et cherchant son regard, elle lui dit :

- Et toi, Cruz, est-ce que tu vas bien ? Es-tu heureux ? As-tu ... as-tu ...

Non, elle ne pouvait pas. Elle ne pouvait se résoudre à poser cette putain de question qui allait la tuer sur place et faire de Prudence une orpheline. De plus, elle connaissait la réponse. Tout comme elle le faisait pour Ugo, elle ne pouvait s'empêcher de prendre des nouvelles de ses fils. Par l'intermédiaire d'un détective privé, mais aussi de la presse à scandale. Elle savait tout. Ou presque. Et, comme pour se punir et se faire du mal, elle finit par poser la question.

- As-tu quelqu'un dans ta vie ?

Elle détourna le regard, ses yeux se remplirent immédiatement de larmes sans avoir même eu la réponse de son ancien amant, et son menton commenca à trembler.

Une personne ? Qui ? La jalousie et la rage de se voir préféré à un autre, fit accélérer les battements du coeur de Cruz qui détourna le regard pour s'efforcer de se contrôler. Elle lui demandait de ne pas s'inquiéter mais comment le pouvait il ? Il ressentait pour ce bébé un amour particulier qu'il ne savait que trop bien expliquer. Depuis qu'il s'était perdu dans son adorable regard, il savait qu'il donnerait tout pour satisfaire cette petite fille. Il voulait la protéger de lui et de l'influence de la famille Preston et Shawell. Il voulait éviter à Prudence le destin funeste et tragique qui semblait attendre tout ceux qui portaient son nom. Le contact de sa peau avec celle de Beth le fit frissonner avant de le paralyser. Sa bouche s'asséchait et ses yeux ne pouvaient pas se détacher de ses doigts délicats qui touchaient son épaule. Est ce qu'il était heureux ? Est ce qu'il avait quelqu'un ? Est ce qu'elle tentait de prendre de ses nouvelles ou de faire comme si il n'avait rien exister entre eux ? Les deux solutions lui paraissaient horribles. La première parce que depuis son départ il avait l'impression de ne plus vivre et la seconde parce qu'elle confirmait sa folie et son hypothèse d'un amour à un seul sens.

- T'as pas le droit de me demander ça.

Cruz ferma les yeux pour ne pas voir les larmes dans les yeux de Beth. Il poussa un profond soupir avant de poser ses mains sur le visage de la jeune femme. Son pouce essuya une larme qui roulait sur la joue de Beth. Ce simple geste de tendresse le fit souffrir. Il s'éloigna, la gorge et les lèvres sèches, et s'appuya contre l'un des murs.

- Il y a effectivement quelqu'un. Une fille... Elle s'appelle Chloé.

Il ne savait même pas pourquoi il parlait de la junkie alors qu'il n'avait techniquement aucun sentiment pour elle et son atroce chevelure blonde et bouclée. Il ne voulait que sa mort et pourtant c'était elle qui prétendait aimer.

- Et toi ? Je suppose que ce n'est pas les propositions qui ont dû manquer.

Elle se maudissait autant qu'elle le haïssait. Elle qui avait toujours voulu être une mère parfaite, qui avait lu des milliers de manuels d'éducation, elle avait du louper un chapitre. Le chapitre qui lui expliquerait comment se comporter dans cette situation. ELle savait bien que si ce chapitre n'existait pas, c'était parce que cette situation ne se devait pas d'exister, mais pourtant, elle était bien réelle et détruisait Beth. Rongée par divers sentiments et émotions qui se mêlaient, elle avait la nausée. Depuis plusieurs mois, Beth n'avait qu'un mot à la bouche. Pourquoi? Pourquoi tout ça? L'avait-elle mérité ? Sûrement.
Elle acceptait donc son destin qui était de souffrir pour laisser Cruz s'épanouir loin d'elle. Elle ne pouvait accepter d'effacer leur amour, de toute façon, Prudence était la preuve vivant de leur amour. Elle était un parfait mélange de ces deux corps et esprits réunis. Alors entendre de la bouche de Cruz le prénom d'une autre femme lui donna la nausée. Quand il lui attrapa le visage pour lui essuyer une larme, elle se demanda par quel miracle elle tenait encore debout, tant elle avait les jambes comme du coton.
Quasiment en même temps que Cruz, elle s'éloigna du corps interdit, pour se réfugier vers la fenêtre, dos à la fenêtre, abordant un regard dur. Chloé. Alors c'était donc elle qui retenait son amour. Pour Beth, il n'y avait pas d'autres solutions, elle devait la tuer. L'éliminer. La faire disparaître.
Tout ceci lui donnait envie de vomir. Et quand Cruz lui parla des prétendants qui semblaient se battre au portillon pour elle, s'en fut trop. Comment pouvait-il traiter avec aussi peu de respect leur histoire d'amour ? Elle se pencha vers la fenêtre, pouvant dans un premier temps laisser croire à une défenestration. Mais elle se contenta de vomir. ELle vomit sa haine. Sa colère. Sa tristesse. Sa douleur. Son amour.
Puis, se relevant, après avoir essuyé sa bouche, et relevé ses longs cheveux, celle qui avait été élue femme la plus sexy de la planète, les yeux pleins de larmes de haine et de tristesse répondit :

- Je ne suis la femme que d'un seul homme. Comment ... comment peux-tu dire ça Cruz ? Comment peux-tu m'oublier si vite ? Je deviens folle.

S'apercevant qu'elle venait d'agir exactement de la façon qu'elle ne voulait absolument pas, elle se mordit l'intérieur des joues, jusqu'au sang, pour se faire taire. Pour arrêter ce flot de paroles débiles qui ne feraient qu'aggraver la situation.

Cruz se précipita vers la fenêtre en voyant Beth se pencher. Son coeur manqua un temps et soulagé de ne la voir "que" vomir, il posa ses mains sur son corps presque nu. Il la regarda se remettre, retrouver un visage présentable comme si elle en avait besoin, avant de lui dire avec une violence à peine contenue qu'elle n'était la femme que d'un seul homme. Cette phrase le fit sortir de ses gonds et il défit la serviette que portait Beth la mettant nu. Il se lova contre elle et eut l'impression de devenir fou en sentant l'odeur de Beth. Cruz pressa sa bouche contre les siennes, sa langue força le barrage de ses lèvres pour la soumettre à son désir. Le goût métallique du sang de Beth s'imprima sur son palais et lui fit réaliser qu'encore une fois la présence de la jeune femme influait sur son comportement. Il avait peur de l'homme qu'elle le faisait devenir. Sa bouche dévia sur sur sa nuque avant que ses mains ne la repoussent et la vision brouillée par les larmes, il se mit à hurler :

- Tu appartiens à un dément, à un meurtrier !

Cruz n'oubliait pas qu'il avait manqué de tuer Prudence et Beth, lors de leur dernière rencontre. Il sentait encore cette violence tenter de se saisir de lui. Il avait encore envie d'écarter ses cuisses et de la prendre de force. Il avait envie de la pénétrer avec violence pour enfin faire ce désir qui le rendait fou. Il disait devenir folle mais il refusait de croire qu'elle souffrait autant que lui. Dans ce cas pourquoi revenait elle ici ? Haletant il s'agenouilla dans un coin de la pièce et posa ses mains sur ses oreilles pour faire taire le bourdonnement qu'il était sans doute le seul à entendre.

Elle ne voulait pas ça. Elle ne voulait rien de tout ça. Elle ne voulait pas une passion destructrice. Elle ne voulait pas que leurs corps se mélangent ainsi, dans la violence, dans la colère et la douleur. Elle ne voulait pas que son amour détruise ainsi Cruz. S'il le fallait, elle s'effacerait. Pour lui. Pour eux. Pour la famille qu'ils devaient former. Elle se laissa faire, elle se laissa brusquer par l'impulsivité de Cruz, de cet homme enfant qu'elle aimait éperduement au point de pouvoir tout lui pardonner. Elle se laissa donc se faire dévêtir, et se faire briser et émietter un coeur déjà en morceau quand Cruz lui dit qu'elle était l'homme d'un meurtrier.
Ils ne pourraient donc jamais passer à autre chose. Ils étaient réellement des amants maudits, ne pouvant pas vivre paisibles et heureux. Elle le laissa s'éloigner d'elle, et s'empressa de se revêtir du peu qu'elle portait déjà sur elle. Elle était la mère. Elle était l'adulte. Elle était l'élément solide. Elle était celle qui devait être là pour Cruz. Pourtant, elle avait peur de le voir ainsi, agenouillé dans un coin de la pièce, tel un enfant coupé du monde. Elle ne savait pas comment réagir. Au fond d'elle, elle avait la solution. Mais la solution était impossible. Elle ne pouvait lui révéler son amour, lui demander de fonder une famille avec Prudence. Elle n'en avait pas le droit.
Elle ne pouvait pas non plus se comporter en mère. Elle était dans une impasse. S'il avait été Adrian, ça aurait été si simple. Elle avait tellement l'habitude de gérer, manipuler, contrôler, rabaisser Adrian, qu'elle aurait su quoi faire. Mais il n'était pas Adrian. Et elle n'était plus la Beth castratrice.
Partagée entre mille sentiments, entre plusieurs attitude, elle opta dans l'afollement pour celle qui lui paressait la plus simple. Elle resta debout, dos à Cruz pour ne pas ressentir encore plus sa souffrance, et dit posément, changement alors radicalement de comportement en une fraction de seconde :

- Va la rejoindre. Je s'aurai t'attendre.

Puis, regrettant déjà amèrement ses paroles, ne supportant l'idée et encore moins l'image de voir Cruz heureux dans les bras d'une autre, elle se servit inconsciemment de sa fille pour tenter de le faire rester, pour le retenir auprès d'elle, ne serait-ce que comme le père de sa fille et non plus son grand amour

- Mais ta fille, elle, ne pourra pas grandir longtemps sans son père ...

La rejoindre ? La junkie aux bras rachitiques qui suçait son frère pour quelques dollars qui paieraient sa came ? Il préférait encore se foutre en l'air. En fait il avait l'impression que Chloé n'était que la représentation humaine de son mal-être. Du temps de Loan il n'aurait jamais fait attention à cette opportuniste qui aujourd'hui parvenait à le hanter presqu'autant que Selena ou la Madone. Il ferma les yeux pour effacer son visage angélique et trompeur de son cerveau. Une histoire d'amour avec elle paraissait aussi compliquée que celle qu'il avait envisagé il y a un temps avec Selena avant que le vice ne le corrompe totalement et que la belle latine ne s'enfuit d'effroi. Ses mains retombèrent le long de son corps accroupi tandis que Beth lui parlait de Prudence. Il avait l'impression que ce bébé était le dernier être pur de cette planète et il avait dû mal à croire qu'il pouvait être rattaché à elle d'une quelconque façon. Sa voix était rauque et il effaça d'une main les larmes qui roulaient malgré lui sur ses joues.

- Qu'est ce que tu attends de moi, maman ? Dis le moi ?

Il leva des yeux presque implorants vers elle. Lui rappeler son rôle et sa place d'enfant était une façon de lui faire comprendre la torture qu'elle infligeait en lui demandait d'occuper un rang qu'il ne méritait pas selon lui. Il était trop jeune, trop coupable pour être le père de Prudence. Il voulait Beth mais en même temps il la repoussait. Tout se mélangeait, tout était confus. Il étouffait. Les poings serrés, il n'attendit même pas la réponse de sa mère avant de quitter la pièce. Mettre de l'espace entre eux. C'était tout ce qu'il voulait. Ne plus la voir, la sentir, la deviner. La vision de son corps nu le torturait sûrement pendant de longues heures avant que la drogue ne parvienne à l'abrutir suffisamment pour qu'il ne pense plus à rien. Les mains moites il composa rapidement le numéro de téléphone d'un taxi pour se rendre n'importe où mais loin d'ici. Réfugié dans la cuisine, Cruz s'efforçait d'ignorer les éventuels bruits qui provenaient de la salle de jeu. Il ne voulait pas savoir si Beth le rejoignait ou si elle était restée dans la pièce, prostrée et résignée.

- Ne m'appelle plus ma ... man ...

Trop tard. Il était parti. Il fuyait. Encore. Que fuyait-il, ou bien qui ? Elle, leur fille, leur vie, tout en même temps ? Beth aussi fuyait. Elle fuyait cet amour destructeur. A quoi bon ? Leur amour était interdit.
Au bord de la crise de nerf, Beth aussi devait partir. ELle devait quitter cette pièce étouffante, cette maison maudite. Elle voulait prendre le volant, rouler à une vitesse non raisonnable, peut être même foncer dans un mur et ne jamais s'en remettre. Quand de telles idées commencaient à traverser la tête de Beth, elle devait se calmer, sinon, elle était capable du pire.
Elle aurait pu débouler dans la cuisine, se jeter dans les bras de Cruz, et lui dire ce qu'elle attendait de lui, qu'elle le voulait comme un amant, un père, un ami, l'homme de sa vie. Qu'elle avait envie de lui. Qu'elle voulait qu'ils forment une famille. Qu'elle voulait qu'il ne voit plus aucune autre pétasse.
Elle aurait pu débouler dans la cuisine, se jeter sur lui et le frapper, lui dire qu'elle attendait de lui qu'il parte, qu'il la laisse tranquille et arrête de la torturer, qu'il ne la revoit jamais et disparaisse de sa vie et de celle de Prudence.
Mais elle a quitté la maison, s'asseyant sur les marches du perron, essayant d'appliquer les conseils de sa sophrologue personnelle qui l'avait suivie au cours de sa grossesse. Mais elle n'arrivait pas à se calmer. Elle avait si peur que Cruz quitte cette maison et ne revienne jamais. AU bout de quelques minutes, quand elle sentit qu'elle était capable de se contrôler, elle se leva et rentra, se dirigeant vers la cuisine.
Là, elle retrouva Cruz, et lui dit :

- Je veux que tu viennes revivre ici. J'ai peur toute seule dans cette immense maison.

Elle ne pouvait lui avouer qu'elle avait besoin de lui, de sa présence. Elle ne pouvait se montrer aussi égoïste. Mais lui demander de revenir, comme une mère le demande à son fils, du moins aux yeux de ceux ignorants tout de cette affaire, elle s'en sentait capable. Avec Cruz au quotidien auprès d'elle, elle pourrait lui faire comprendre que c'était là qu'il se sentait bien, que c'était avec elle et Prudence qu'il voulait vivre. Pour toujours.

La solitude et l'éloignement momentané lui permettait de reprendre ses esprits, de réaliser tout ce qui venait se passer. Il avait revu Beth. Une fois encore il l'avait fui, une fois encore il s'était senti blessé par sa seule présence. Une fois encore il avait l'impression de ne pas mériter sa compréhension et son amour. Il avait envie de retourner la voir pour s'excuser mais il avait peur. Peur de son refus ou pire encore qu'elle accepte et qu'elle lui pardonne. Il avait honte de lui. Cruz ouvrit la porte du réfrigérateur et s'abandonna quelques minutes à sa contemplation, répertoriant mentalement tout ce qui se trouvait à l'intérieur. Peu passionnant certes mais reposant. Il referma la porte à la hâte en entendant les bruits pas de Beth qui le rejoignait. Cruz fut quelque peu abasourdi par la demande de sa mère, il s'attendait plus à un départ de sa part.

- Toi Beth Preston ? Toi, tu as peur ?

Il ne put s'empêcher de laisser échapper un petit rire ironique qu'il savait blessant. Il savait pertinemment que malgré le courage dont elle faisait chaque jour preuve, elle n'avait rien de la femme robot froide et invincible qu'on admirait dans les journaux. Il se leva et attrapa sa main comme pour s'excuser de ce qu'il venait faire.

- D'accord je reste. Mais je veux que Warhol vienne aussi.

Si Beth ne connaissait pas aussi bien son fils, elle aurait laissé tomber depuis longtemps. Il la connaissait lui aussi. Il savait que sous ses airs de femme intouchable, elle était la femme la plus fragile, qu'elle pouvait s'effondrer quand il s'agissait de sa famille. Elle avait besoin d'un homme à ses côtés, pour la rassurer, pour lui faire croire à nouveau en l'amour, pour lui donner confiance aux hommes. Mais alors pourquoi lui demandait-il si elle avait peur. Oui, elle avait peur. Peur de l'avenir sans lui à ses côtés.
Alors, comme une petite fille, honteuse de l'avouer, elle baissa les yeux et murmurra

- Pourquoi ne comprends-tu pas ...

Elle était en train de rendre les armes, quand elle entendit ces mots. Ses mots à lui. Des putains de mots qu'elle n'avait osé espérer entendre un jour. Elle n'en croyait pas ses oreilles, et resta estomaquée pendant quelques dixième de secondes ... Juste le temps de réaliser qu'il y avait un mais. Une putain de condition qu'elle ne pouvait accepter. Avec Warhol sous son toit, c'était comme être en cure de désintox' avec de la cocaïne sous le nez, mais sans pouvoir y toucher. Comme dire à un enfant qu'il n'aura pas droit à la surprise de son Kinder surprise. Warhol allait être un frein à leur amour. A leur histoire. Pourquoi faisait-il ça. Avait-il peur d'elle ? Se protégeait-il d'elle en invitant Warhol ? Craignait-il que Beth vienne abuser de lui pendant son sommeil ? Beth était perdue. Alors que le naturel de mère stricte revenait à grands pas et qu'elle s'apprêtait de lui dire qu'elle était encore sa mère et qu'elle avait droit de refuser un étranger sous son toit, elle s'auto-censura et, dépitée, demanda :

- Tu as si peur de l'amour que ça Cruz ? Tu en es arrivé au point de mettre un stupide copain entre nous ?

Beth savait qu'elle avait perdu. Le visage triste, elle ne comptait pas s'éterniser dans la cuisine. Cruz semblait avoir choisi, et elle ne faisait pas partie du choix, du moins pas entièrement. Elle n'arrivait même plus à se réjouir du retour de Cruz sous le toit des Preston.

[Hj : Lamentable je sais]

- Peut-être... Mais si tu veux que je revienne alors il faudra que tu acceptes cette condition.

Warhol serait ravi de revenir au sein d'une famille en conflit, ça lui rappellerait sûrement la sienne même si sa mère n'avait rien en commun avec la vulgaire Carly. Le visage décomposé de sa mère ne parvenait pas à l'amadouer. Il avait pris sa décision et ne reviendrait pas dessus même si voir Warhol se balader à poil dans son manoir ne l'enchantait guère. Cruz resta quelques secondes silencieux en face de sa mère, les mains posées sur le plan de travail de la cuisine, avec une mine féroce et décidée de gamin pourri gâté. Inconstant et incapable de la faire souffrir plus longtemps il contourna le meuble pour s'approcher de Beth. Il posa une main sur sa joue et sa bouche sur l'autre. Un petit baiser de petit con à sa maman chérie.

- Tu sais Beth j'aimerais être cet homme fort que tu attends. Ou ce fils dont tu étais fier avant. Tu sais parfois notre famille me manque.

C'était dur à admettre mais l'équilibre factice que Beth avait crée avait entre tous les membres de la famille lui avait donné la force de supporter ses sentiments pour elle, il se sentait obligé de se taire et de ne rien divulguer parce qu'il aimait le respect qu'inspirait la perfection de leur famille. Il aimait voir Beth être admirée par tous. L'avantage était qu'avec Warhol dans la maison il aurait une bonne raison pour s'empêcher de rejoindre sa mère dans sa chambre.

pale

[HJ : mais si c'est très bien I love you

]

Pourquoi Beth ne pouvait-elle rien refuser à Cruz ? Pourquoi Cruz cherchait-il à reprendre sa place de fils ? Pourquoi était-il tombé amoureux d'elle, tout était si compliqué depuis ce putain de jour. Compliqué au point que dans la tête machiavélique de Beth, l'idée de trafiquer un test de parentalité pour prouver à Cruz qu'il n'était pas son fils biologique lui trottait depuis quelques temps déjà.
Il lui parlait de famille. L'ancienne famille n'était qu'une comédie. Chacun jouait un rôle pré-écrit par Beth en personne. Elle était tel un metteur en scène, faisant évoluer enfants et mari comme des marionnettes, comme des pions. Il n'y avait plus de famille. Plus celle ci. Cette famille était morte et enterrée aux yeux de Beth. Maintenant, sa famille, c'était Prudence. Prudence et son amour pour Cruz. Un peu comme ses femmes veuves qui continuent de laisser une assiette tous les soirs à table pour leur défunt mari, Beth s'imaginait encore avec Cruz.

- Ok pour Warhol.

Elle avait dit ça par dépit, sans aucune conviction. Cruz lui dictait les lois, elle les acceptait, comme elle les avait toujours acceptées. Il pouvait faire d'elle ce qu'il voulait. Il était le seul homme sur terre à avoir ce pouvoir. Il lui demanderait de se tuer pour lui, elle le ferait, sans hésiter. Elle était blasée, et ça s'entendait dans sa voix. Peut-être signe précurseur qu'elle ne se batterait plus pour lui. Il continuait à parler de lui comme son fils. ELle ne pouvait le supporter. Que cherchait-il à lui prouver ? Que leur amour était répugnant ? Qu'ils devraient être tous deux internés, voire condamné à la peine de mort ? Elle n'avait pas besoin de lui pour le savoir, seulement pour Beth, tout ça en valait la peine. Plus pour lui apparemment. Dans un dernier espoir, Beth lui répondit :

- Notre famille à nous est naissante Cruz. Tu l'as juste sous tes yeux mais tu ne veux pas l'admettre. Tu n'es sûrement pas prêt pour ça.

Elle s'éloigna de lui, ne pouvant supporter qu'il la touche sans avoir droit à plus, sans avoir droit au bonheur. Elle attrapa son sac à main, voulant partir loin de là, loin de lui. Elle se retourna vers lui pour lui dire :

- Peux-tu t'occuper de notre fi... de Prudence, s'il te plait. J'ai un rendez-vous. Je serai là pour le repas ce soir, dis à Warhol qu'il pourra s'installer après.

Ok pour Warhol. Waouh il n'aurait cru que Beth aurait cédé si facilement. Il connaissait son aversion pour tous les étrangers qui tentaient d'intégrer leur famille alors qu'elle lui passe ce caprice. Il y avait de quoi être surpris. En même temps Cruz devait admettre qu'il était soulagé de la voir accepter. Avec Warhol dans les parages il se sentait protéger de lui-même et de ses pulsions contre nature. C'était apaisant de retrouver sa place d'adolescent même s'il n'en était pas fier. Beth s'éloigna de lui et aussitôt le manque se fit ressentir, brutal et étouffant. Plus elle s'éloignait et plus il la désirait comme jamais. Pourtant il faisait son possible pour se calmer et réprimer ses envies. Il y allait de sa santé mentale. Cruz savait que s'il s'écoutait la situation empirait. Il devait tenter de se mettre dans le rang et d'obtenir enfin un semblant de normalité dans sa vie. Cruz écarquilla les yeux quand elle évoqua sa famille naissante. Il avait l'impression d'étouffer face au poids de cette réalité qu'il ne se sentait pas encore près à assumer. Un enfant et une femme. A son âge. Bien sûr qu'il les voulait mais pas maintenant et pas comme ça. Prudence. Elle était mignonne et belle à croquer mais elle représentait beaucoup de responsabilités à ses yeux. Beth lui annonça ensuite son intention de sortir et son coeur fit un nouveau bond dans sa poitrine tandis que les questions se multipliaient. Etreint par la jalousie et la curiosité, sa voix tremblait alors qu'il s'efforçait de prendre un air détaché qui ne tromperait sûrement pas sa mère.

- Très bien.

Lui demander où elle allait ? En avait-il seulement le droit ? Il devait reprendre sa vie d'adolescent et sa place de fils. Il devait arrêter de considérer Beth comme sa petite amie et attendre d'elle qu'elle lui rende des comptes. Elle était une femme célibataire et séduisante qui maintenant pouvait refaire sa vie. Sans lui.

- On se voit tout à l'heure alors...

Et voilà, une nouvelle page était tournée. Après tout, c'était ça la vie. Finir des chapitres, en commencer des nouveaux. Beth attaquait désormais l'un des plus difficiles de sa vie, celui de vivre sans l'amour de Cruz. Il venait de le lui faire comprendre, et même si Beth était loin d'avoir accepté et d'avoir jeté les armes, pour cette première bataille, elle s'avouait vaincue. Persuadée qu'en éliminant Chloé elle retrouverait l'amour de son fils, Beth avait désormais cette nouvelle priorité dans la vie. Tout comme rendre jaloux Cruz, par tous les moyens. C'était de cette manière qu'elle avait réussi à vivre près de 20 ans avec Adrian, elle était prête à recommencer avec Cruz.
Après tout, Cruz tendait le bâton pour se faire battre en faisant venir Warhol à la maison. Beth connaissait la réputation de ce jeune homme, et elle savait qu'elle n'aurait pas besoin de grand chose pour le faire baver et ramper à ses pieds. Peut être que cela serait l'élément déclencheur pour Cruz. Ou peut être pas.
Beth quitta donc la cuisine, un sourire aux lèvres adressé à Cruz, et monta à l'étage passer une petite robe légère et printanière, et surtout très sexy. Jouant de la situation, elle redescendit quelques minutes plus tard, après s'être maquillée et parfumée, divinement jolie, la fermeture de sa robe coincée en plein milieu du dos. L'air totalement naturel et détaché, elle s'approcha de Cruz, et lui demanda naïvement :

- S'il te plait, peux-tu remonter la fermeture, elle est coincée, je n'y arrive pas. Je ne veux pas être en retard à mon rendez-vous ...

Rendez-vous mystérieux que Beth comptait bien garder secret encore un peu.

Le sourire qui flotta l'espace d'un instant sur les lèvres de Beth, avant qu'elle ne quitte la cuisine, retourna Cruz. Parce qu'il savait que ce sourire esquissé n'avait rien de la risette insignifiante. Beth lui préparait un coup magistral et tordu dont elle seule avait le secret. Il l'avait sans doute déçue en refusant de devenir un père officiel et stable pour Prudence. Il s'était montré faible et il savait combien Beth ne pouvait souffrir sans courage. La pauvre devait tomber des nues en découvrant que son ainé - et préféré - ne valait finalement guère mieux que son second fils. Cruz imaginait à peine la déception que devait ressentir la parfaite Beth d'avoir engendré deux enfants absolument indignes d' elle et de sa force de caractère. Cette pensée le déprima tellement qu'il fouilla dans sa poche droite à la recherche du dernier cachet d'ectasy offert par son meilleur ami et futur coloc. Il le déposa sur sa langue l'air rêveur et perdu. C'est au même instant que Beth refit son apparition encore plus belle que tout à l'heure, vêtue d'une robe élégante qui laissait présager de l'importance de ce mystérieux rendez-vous à ses yeux. La jalousie nichée dans le creux de son estomac remonta comme une boule et se logea au milieu de sa gorge. Il essuya ses mains moites - à cause de la rage qu'il contentait - sur son pantalon avant de s'exécuter la gorge sèche. Une fois la fermeture remontée, son index suivit la courbe délicate des épaules de Beth avant de se stopper avant que le désir ne lui embue définitivement l'esprit. Cruz s'éloigna de plusieurs pas, terrifié par les images mentales perverses et à la limite de la censure qui se bousculaient dans son esprit. Les yeux fixés sur les magnets du réfrigérateur qui formaient le mot PENIS, Cruz s'obligeait à ne pas jeter un seul regard à Beth.

- C'est un rendez-vous d'affaire ?

Cruz tenta d'avoir l'air le plus innocent et le plus inintéressé possible, mais ses joues rouges et son regard lointain en disaient suffisament long sur la colère et la curiosité qui l'habitaient à ce moment.

Beth se faisait violence. Elle se faisait mal aussi. Etre si proche du corps de Cruz et ne pouvoir l'enlacer, l'embrasser, le caresser, c'était une vraie torture. Elle ne pouvait pas se laisser aller dans les bras de celui qui avait été son amant, son protecteur ,son défenseur, son déclencheur du bonheur. La tentation était trop forte, Beth était obligée de se mordre les lèvres pour résister et ne pas craquer, sentant déjà un léger goût de sang sur ses lèvres, ce qui ne faisait qu'accroître son désir pour le jeune homme, attirée par lui un peu comme le vampire l'était par le sang. C'était charnel, passionnel.
Serrant les poings, Beth se laissa ennivrer par l'odeur de Cruz, se sentant légérement faiblir, avant de se ressaisir. Etait-il jaloux pour lui demander si son rendez-vous était professionnel ? Beth n'osait le croire, elle se refusait de se laisser bercer par l'illusion que Cruz était jaloux. S'il était jaloux, c'était la confirmation qu'il l'aimait encore, qu'il tenait à elle et donc que rien n'était perdu.
Reprenant alors confiance en elle, Beth retrouva son assurance, et reprit son petit jeu entreprit pour justement faire réagir Cruz. Elle allait conserver le mystère jusqu'au bout, espérant pousser la curiosité et la jalousie de Cruz à la suivre et peut être à se jeter à nouveau dans ses bras. Beth se rendait compte que c'était sûrement malsain, surtout de la part d'une mère, mais la faim justifiait les moyens, et pour elle, c'était pour la bonne cause : réunir ces deux amants maudits.
Retournant vers Cruz pour lui déposer un léger baiser sur le front pour lui signifier son départ proche, Beth, avec un sang froid remarquable, chercha la confrontation du regard avec Cruz et lui répondit :

- Non, je dois retrouver une vieille connaissance, il est de passage en ville pour quelques jours.

La garce, la garce, la garce. Il la détestait. Mais en même bon sang il la désirait presque autant que l'autre junkie blonde quand elle lui avait annoncé qu'elle était fiancé à son frère. Les choses n'avaient jamais été aussi tendues entre Beth et lui depuis qu'ils s'étaient déclarés leurs sentiments respectifs il y a de cela presque un an. Cruz soupçonnait sa mère de prendre un malin plaisir à le tittiller de la sorte mais il n'avait aucune preuve si ce n'est le fait de la connaître depuis toujours. Lorsque Beth s'approcha de lui, les lèvres tendues Cruz se mit à déglutir espérant recevoir un baiser mais beaucoup plus bas. Genre sur les lèvres et pas sur le front comme s'il était juste son... fils ?!? A croire qu'il y a quelques minutes il était en plein rêve et que Beth ne lui avait jamais demandé d'être un père pour Prudence. Qui était cette mystérieuse connaissance vraisemblablement masculine qui comptait suffisamment aux yeux de sa mère pour qu'elle abandonne dans une trop grande demeure c'est deux biens les plus précieux ? Qui que ce soit il le haissait déjà et il allait se venger sur lui de la plus horrible des façons.

- Je le connais ?

Cruz croisa les doigts derrière son dos et aussi ses orteils en espérant qu'il s'agisse d'un ancien copain d'école devenu avec les année, gras et libidineux, un mec bien tordu qui loucherait. En somme son parfait contraire.

&

Beth se détestait d'agir ainsi avec Cruz. Son coeur lui criait de faire tout le contraire de ce qu'elle était en train de faire. Mais elle ne pouvait s'en empêcher. Elle voulait le provoquer, créer une sorte d'électrochoc. Elle pensait que c'était quand on se rendait compte que l'on était en train de perdre quelqu'un qu'on s'aperçevait à quel point cette personne était nécessaire pour votre survie, et qu'on acceptait alors de l'avouer. Ainsi, on montrant à Cruz qu'elle allait voir ailleurs et non l'attendre indéfiniment, peut être que cela aurait l'impact souhaité et que Cruz allait prendre conscience qu'il était amoureux d'elle uniquement et prêt à s'investir.
Peut - être le regretterait - elle si cela s'avérait innefficace, mais Beth ne voyait plus aucune solution. Elle le toisa du regard, hésitant à lui répondre, l'air de dire que cela ne le concernait pas vraiment, puis cédant à sa demande, elle lui répondit :

- Non, mais tu aurais pu. C'est un vieil ami à ton père et à moi, que j'ai perdu de vue en épousant Adrian ... On avait un peu flirté ensemble et ton père ne voulait plus que je le revois.

Beth regarda Cruz attentivement, guettant sa réaction. Elle aurait aimé qu'il s'enflamme, casse un verre ou la pile d'assiette qui était à portée de main, l'attrape par la taille et la plaque contre le mur pour l'embrasser et remonter sa robe pour goûter à nouveau à son corps.

Si Cruz Preston était un personnage de dessin-animé à ce moment là il aurait sûrement les joues et le nez rouge et de la fumée grise qui lui sortirait des oreilles. Il devenait dingue. Dingue à force d'imaginer Beth dans les bras d'un autre. Même Adrian s'était senti obligé de mettre dans le holà entre sa mère et cet homme mystérieux. Cruz tapa du poing sur la table faisant sursauter la grosse gouvernante qui jura dans sa langue natale sans doute lasser des excentricités et du comportement désinvolte de son jeune maitre.

- C'est Simon, c'est ça ?

Cet espèce de basketteur blond et sans intérêt aussi fade et creux que son père, qui partageait parfois les couvertures des plus grands magasines avec eux. Souvent ennemis puis concurrents sur le terrain peut-être qu'ils s'étaient aussi affrontés pour le coeur de Beth et que sa mère soucieuse que tout se déroule selon sa volonté avait effacé de son autobiographie personnelle ce triangle amoureux. Excédé de ne plus pouvoir contrôler la situation et de voir Beth quitter son rôle de mère incestueuse et fidèle, les sourcils de Cruz manquèrent de se chevaucher l'un sur l'autre (a) tant il les fronçait. La coupe de fruit à quelques centimètres de sa main s'écrasa sur le sol sans qu'il n'y prête aucune intention.

- Beth t'as pas le droit de me faire ça ! C'est déguelasse.

Ca y est, l'électrochoc avait fait son effet, puissant et violent. Si Cruz n'avait pas semblé réagir très mal, Beth se serait même permise d'afficher un léger sourire de satisfaction face à la scène, mais le voir ainsi lui coupa toute envie de sourire. Elle s'en voulait d'employer de telles méthodes pour parvenir à ses fins, mais elle y était contrainte. Elle devait montrer à Cruz qu'elle n'allait pas continuer longtemps à se faire traiter de la sorte, qu'elle avait besoin de lui, de son amour, de sa protection. Et si pour cela il fallait lui faire croire qu'elle pouvait aller se réfugier dans les bras d'un autre, elle le ferait.
Beth s'était jurée de ne pas révéler l'identité de son rendez-vous mystérieux. Simon ou pas Simon, l'important était que Cruz comprenne que sa mère était avant tout une fois convoitisée, séduisante et qui avait besoin d'être aimée. L'important était de provoquer la jalousie chez ce dernier afin qu'il accepte l'innacceptable : vivre son histoire d'amour avec Beth au grand jour, et lui être fidèle. Ou pas. Après t out, Beth avait supporté tant d'infidélités de la part d'Adrian qu'elle était prête à passer outre les putes de Cruz.
Elle ne répondit donc pas à la première question de Cruz, il avait suffisamment mal comme ça, et Beth aussi. Elle sursauta au bruit de la coupe de fruits qui s'explosa sur le sol de la cuisine. C'était une des dernières pièces du service de mariage d'Adrian et elle, c'était comme un signe qu'une nouvelle ère était en train de naître, et que ça allait faire beaucoup de dégâts. Mais Beth y était préparée.
Tentant de se maîtriser, de garder son calme et s'empêchant de se jeter dans les bras de Cruz, pour le calmer, le rassurer, lui dire qu'il n'y avait que lui dans son coeur, et ce pour toujours, Beth garda ses distances, et dit d'un ton las :

- Et ce que tu me fais avec Chloé, et sûrement bien d'autres, ce n'est pas dégueulasse Cruz ? Je ne suis pas ta poupée, je ne peux pas tout accepter. Je suis la mère de ta fille, et tu ne respectes même pas cela.

Beth se baissa pour commencer à ramasser les restes de son ancien mariage, une larme et une seule coulant le long de sa joue, lui brûlant la peau et le coeur. Elle ne voulait pas que Cruz voit cette faiblesse de sa part.

Beth le rendait fou à ne pas répondre. Il en était désormais sûr c'était cette petite raclure de Simon. Cet enfoiré. Il allait lui faire la peau. Dès qu'il aurait fait de la musculation et réunit les 10 000 dollars nécessaires pour employer le tueur à gage qu'il le descendrait. Cruz ferma les yeux quand Beth parla de Chloé. Comme pouvait elle se comparer à cette petite catin qui l'obsédait seulement parce qu'elle se refusait à lui. Oui parce qu'il en était certain le noeud du problème Cruz/Chloé c'était que la junkie s'était fiancée avec son frère avant qu'il ne puisse la sauter. Bon en fait il était déjà obsédé par elle bien avant ça mais il aimait croire que ce problème pouvait se régler au lit. Alors qu'entre Beth et lui c'était tellement plus fort.

- Tu me demandes de respecter quelque chose que je n'arrive même pas à accepter. Je ne me considères pas comme le père de Prudence, j'ai pas envie d'être son père...

Cruz n'osa pas regarder Beth en prononçant cette phrase. Il garda le silence sentait lui-même qu'il était allé beaucoup trop loin. Il releva enfin les yeux et un sourire désolé se dessina sur ses lèvres, le même qu'il faisait quand il était petit et qu'il venait de faire une grosse bêtise. En général ça marchait mais est ce que quinze ans après il possédait toujours ce pouvoir.

- J'ai pas envie de te voir partir avec un autre.

Cruz prit la main de Beth et la couvrit avec la sienne avant de baisser sur elle un regard de chien battu qui il espérait suffirait à obtenir le pardon de sa mère. Il l'embrassa dans le cou et de remonter à ses lèvres qu'il effleura avant de faire glisser ses mains sur ses hanches.

- On qu'à tout oublier, ok ? A commencer par ce rendez-vous...

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